« C’est un fait indéniable que nos sociétés contemporaines changent de visage sous les effets conjugués d’une immigration de masse et d’une société de consommation de plus en plus addictive et hédoniste, avec l’obligation corollaire de communier obligatoirement dans la religion totalitaire des droits de l’homme ».
Vous êtes nouveau dans le paysage éditorial. Pourriez-vous vous présenter ?
Pas si nouveau que cela, puisque je collabore ou ai contribué, depuis plus de quinze ans, à divers journaux et revues, de Rivarol à L’Action française 2000, en passant par Le Choc du mois, Réfléchir et Agir, Nouvelle Ecole ou Boulevard Voltaire. Je suis assez inclassable et si je devais me définir, je reprendrai cette citation de Drieu La Rochelle, selon laquelle, je suis plus fidèle à une attitude qu’à des idées.
Vous avez sous-titré votre livre « la dérive kleptocratique du monde contemporain ». Qu’est-ce que cela signifie ?
Comme vous le savez, le sous-titre éclaire bien souvent le titre. Par l’usage d’un mot quelque peu inusité, j’ai voulu montrer (et c’est tout le propos du livre) que nous étions volés à nous-mêmes par ceux qui nous dirigent. En d’autres termes, nous ne nous reconnaissons plus nous-mêmes, notre environnement, autrefois (il n’y a d’ailleurs pas si longtemps puisque la période considérée s’étend sur une petite quarantaine d’année) si familier à notre regard, nous devient peu à peu étranger, tandis que nos codes culturels et sociaux (nos us et coutumes, en quelque sorte) cèdent le pas à des comportements et références plus « exotiques ». C’est un fait indéniable que nos sociétés contemporaines changent de visage sous les effets conjugués d’une immigration de masse (qui est le vecteur de l’islamisation de nos pays) et d’une société de consommation de plus en plus addictive et hédoniste (donc superficielle et éphémère), avec l’obligation corollaire de communier obligatoirement dans la religion totalitaire des droits de l’homme. Tels sont, selon moi, les marqueurs principaux de l’idéologie mondialiste. Le problème, voire le danger absolu pour notre civilisation française et européenne, est que nous finissons par « oublier » progressivement notre être profond et que nous ne savons plus dans quelle direction nous allons. Nous sommes devenus des consommateurs mondialisés, c’est-à-dire, nomades, apatrides, déracinés, acculturés, métissés, aseptisés (par l’hygiénisme ambiant), conformistes (notre esprit critique ayant été étouffé par le « politiquement correct »).
Vous brossez un tableau assez pessimiste, pour ne pas dire sombre, sinon apocalyptique…
Hélas, je n’y suis pour rien, puisque je me suis borné à photographier la réalité en assortissant mes clichés d’une grille d’interprétation, laquelle est forcément subjective, donc discutable. Mais casser ou cacher le thermomètre ne fait nullement redescendre la température et la grippe est toujours là.
Vous balayez beaucoup de thèmes, l’islam côtoyant la « mal-bouffe », elle-même voisinant avec la diplomatie, le « pouvoir d’achat » et des portraits politiques.
En choisissant pour titre, Détournement d’héritages, j’ai emprunté une formule que les notaires connaissent bien mais aussi ceux qui se disent victimes d’indélicatesses de la part de défunts qui les auraient déshérités. Par-là, j’ai souhaité montrer la vie des gens, notre vie. Nous sommes quotidiennement confrontés à des problèmes aussi divers que l’alimentation, la santé, la météo, la peur, etc. Tous les jours, le journal télévisé, la radio ou Internet relatent les horreurs et autre évènements de l’humanité. Quand vous prenez le métro, vous vous affrontez à la réalité brute et entêtée, celle qui vous fait prendre conscience (si vous faites marcher votre sens critique) de tous ces thèmes abordés dans mon livre.
Vous traitez aussi de l’homosexualité et de l’antiracisme. Deux questions relativement explosives quand on sait que la liberté d’expression en ces domaines est en résidence surveillée. S’agissant du premier, vous osez des termes comme « paires » (au lieu de couples) homosexuelles et suggérez même le caractère pathologique de l’homosexualité qui, en ce sens, relèverait de la psychanalyse. Au sujet de l’autre, vous écrivez qu’il est « un racisme voire même un racialisme et, comme tel, un suprématisme ». Bref, n’y allez-vous pas un peu fort ?
Mes propos méritent d’être lus et relus, surtout entre les lignes. Quand j’affirme, que « prenant pour acquis l’axiome freudien, sans courir le risque (et pour cause !) de le démontrer, la psychanalyse contemporaine évacue tout bonnement l’homosexualité du champ de sa critique clinique », c’est moins pour définir l’homosexualité par un marqueur essentiellement pathogène, que pour montrer, en creux, comment la psychanalyse s’est, selon moi, déconsidérée (et donc décrédibilisée) en contournant et en travestissant les évidences. Ce qui est critiquable n’est pas l’homosexualité en tant que telle, qui relève de l’intimité la plus absolue (et qui, se faisant, ne dérange personne, les homosexuels eux-mêmes, dans leur écrasante majorité, réclamant à juste titre, un droit à l’indifférence ), mais le fait que la psychanalyse (à l’instar de la climatologie) est devenue, au fil des décennies (et grâce à l’alibi bien commode mais très discutable du freudisme) un discours monolithique et dogmatique qui ne souffre guère la dissidence. Les débats, souvent vifs, qui ont opposés partisans et contempteurs du « mariage » pour tous et la victoire indiscutée des premiers est symptomatique, à cet égard, de la prégnance de ce discours univoque et, in fine, totalitaire, de la psychanalyse auto-érigée en arbitre des orientations sexuelles. A l’évidence, il me semble que l’enracinement de ce discours dans l’esprit de l’opinion comme dans celui de l’université, a contribué à l’émergence de théories farfelues (« gender », mariage homosexuel, homoparentalité, etc.), appuyées par des revendications marginales mais puissamment relayée au sein des médias et des cercles de pouvoirs. Il en va de même concernant la question de l’antiracisme, que j’aborde sous l’angle, là encore, totalitaire, d’une religion d’Etat.
Toutefois, vous conviendrez que votre propos sera loin de faire l’unanimité, y compris dans « nos milieux »…
Et alors ! En cohérence avec ma démarche, si je combats la pensée unique de gauche, ce n’est pas pour me complaire et m’encaserner (et avec moi, les lecteurs) dans une pensée unique de droite. C’est pourquoi j’appelle à une lecture attentive et subtile de ce livre touchant bien d’autres domaines qui sont autant d’indices de la dépossession de nous-mêmes, en tant que peuple, en tant que Français, en tant qu’Européens.
Votre ouvrage s’appuie sur une vaste bibliographie où l’on perçoit vos influences philosophiques.
Certainement. En écrivant, on se dévoile et il est difficile de demeurer en retrait de soi. Je viens de l’Action française et il ne faut pas s’étonner de retrouver, çà et là Maurras et Bainville. Mais je revendique une filiation non moins forte avec la pensée d’Alain de Benoist, de Jacques Ellul ou de Jean-Claude Michéa. Quoi qu’il en soit, il n’y a pas chez moi de rigidité ou d’obsession idéologique, même si j’aime fréquenter les auteurs qui ont naturellement ma préférence. Et puis reconnaissons d’ailleurs que ce sont ceux qui n’ont pas les faveurs des médias, qui défendent les thèses les plus pertinentes.
Détournement d’héritages, d’Aristide Leucate, éditions de L’Æncre, collection « A nouveau siècle, nouveaux enjeux », dirigée par Philippe Randa, 280 pages, 25 euros